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mardi 17 octobre 2017

Des histoires d'émigrés d'hier en écho à celles des réfugiés d'aujourd'hui

Le Belgenland.

On a tous dans un petit coin de l'oreille les mots "Red Star Line". Sans savoir souvent ce qu'ils recouvrent exactement. "Red Star Line" est le nom de la compagnie maritime belge qui proposait à la fin du XIXe siècle et au début du XXe la traversée entre Anvers et l'Amérique du nord (Etats-Unis et Canada). Entre 1873 et 1934, deux millions de passagers ont emprunté ses paquebots, notamment le célèbre "Belgenland", le plus gros des vingt-trois bateaux. Parmi eux, de nombreux migrants qui fuyaient l'Europe pour différentes raisons et se sont installés de l'autre côté de l'Atlantique.

On en saura plus sur ceux qu'on appelait alors des émigrés avec l'album jeunesse en format carré "Les enfants de la Red Star Line" (Renaissance du livre, 36 pages), paru en cette rentrée littéraire et dû à un trio féminin et belge. Michèle Baczynsky en a écrit la partie fictionnelle, Géraldine Kamps la partie documentaire en fin d'ouvrage,  Emmanuelle Eeckhout a assuré les illustrations.

"Pour écrire cette histoire, je me suis librement inspirée des témoignages de passagers de la Red Star Line", explique Michèle Baczynsky en ouverture de l'album. "Yasha, alias Irving Berlin, le célèbre compositeur, l'avocate Basia Cohen, mais aussi Ethel Weinstein, Oscar Kleinman, Irène Bobelijn, Morris et Ita Moel. J'ai donc écrit l'histoire commune de cinq enfants qui émigrèrent tous en Amérique, mais à différentes époques et sur différents bateaux. J'espère que l'on pourra entendre, à travers eux, les voix des réfugiés d'aujourd'hui, contraints de quitter leur pays à cause de la guerre, des persécutions et de la faim."

"Les enfants de la Red Star Line" se déroule par la voix de Yasha, neuf ans, musicien. Juive, sa famille a dû quitter l'Ukraine et ses soldats antisémites. Direction, l'Amérique. On les suit sur la route qui les mène d'abord en Pologne, ensuite à Anvers. Mais il n'est pas si facile d'embarquer à bord d'un paquebot de la Red Star Line. Quand on est pauvre et en troisième classe, il faut d'abord satisfaire un examen médical!

Les cinq enfants de l'histoire. (c) Renaissance du Livre.
 Voilà finalement Yasha et les siens à bord. La sirène retentit. La traversée commence. Occasion d'explorer le bateau, ses ponts et ses différentes classes. Occasion de rencontrer d'autres enfants, qui ne parlent pas nécessairement la même langue: Jan, le Belge qui parle flamand, Boris, un jeune Polonais de dix ans qui parle yiddish comme Yasha. Et Basia, Polonaise également, qui espère retrouver son père à New York. Le groupe d'enfants comporte aussi Zelda, onze ans, qui voyage seule car elle a été renvoyée à Anvers parce que les médecins américains lui ont interdit l'accès au territoire - un examen médical a aussi lieu à Ellis Island. Ce microcosme d'enfants permet de mieux appréhender la condition du migrant d'hier, qui ne choisit pas sans douleur de renoncer à son pays d'origine mais où une nouvelle vie peut commencer.

"Une nouvelle vie commence pour nous". (c) Renaissance du Livre.

La courte fiction illustrée par Emmanuelle Eeckhout en ligne claire ou en photos redessinées est complétée d'une partie documentaire dont les images sont des archives. On y trouve l'histoire de la compagnie maritime belge, celle de ses deux millions de passagers, dont 200.000 migrants belges, austro-hongrois et russes - un quart d'entre eux sont Juifs, est-il précisé. On y découvre les moments-clés du voyage et la réalité à l'arrivée. Enfin, sont cités les noms d'une série de personnalités ayant voyagé avec la Red Star Line: la future Golda Meir, la future avocate Basia Cohen, Albert Einstein, le futur Irving Berlin. Deux d'entre eux figurent dans le groupe des cinq enfants de la partie fictionnelle.

Reste une question. Qui sont les stars de demain parmi les migrants d'aujourd'hui?





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