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mardi 31 mars 2020

Décès de Tomie DePaola, le créateur de la célèbre "Strega Nonna"

Temps de lire, de relire, de découvrir, de se souvenir, de faire fondre sa PAL,
pour les petits et pour les grands #confinothèque8

Tomie DePaola. (c) Laurent Linn.

On a appris le décès de l'auteur-illustrateur jeunesse américain Tomie DePaola survenu ce lundi 30 mars, dans le New Hampshire, à l'âge de 85 ans. Pas du coronavirus mais des complications lors d'une opération chirurgicale suite à une opération nécessitée par une vilaine chute qui l'avait gravement blessé.

Auteur de plus de 270 livres en un gros demi-siècle d'édition (25 millions d'exemplaires de par le monde) dont assez peu ont été traduits en français finalement, il était entre autres le créateur de la drôlissime "Strega Nona", "Strega Nonna" en français, cette vieille sorcière gentille et serviable qui a ravi des générations d'enfants comme ses autres titres. Personnage ultra-sympathique, elle restera son titre-phare et vivra plusieurs aventures. Son personnage s'était raffiné au fil des ans sur le plan graphique, sans renier son origine populaire venu notamment de la comedia dell'arte.

Il l'avait installée en Calabre, dans le sud de l'Italie, d'où étaient originaires ses grands-parents. A propos du succès de sa "Strega Nona", Tomie DePaola avait déclaré en 2013 à l'agence de presse AP: "Je pense que c'est parce qu'elle est comme la grand-mère de tout le monde. Elle est mignonne, elle n'est pas jolie, elle est plutôt drôle, mais elle est douce, elle comprend. Et elle est un peu impertinente, elle est un peu irritée de temps en temps."


Qui connaît encore Tomie DePaola aujourd'hui? Plus grand monde alors qu'il a été adulé pendant plus de quarante ans. Les générations d'hier sans doute car plus aucun titre de lui n'est encore disponible, hélas, en français. Il avait été beaucoup édité dans les années 1980 et 1990, chez Flammarion Jeunesse, chez Albin Michel Jeunesse, chez Gautier-Languereau...

Tomie DePaola avait su créer des histoires apparemment simples mais qui avaient une vraie profondeur et reflétaient une intense honnêteté émotionnelle. Il disait: "Même si j'aime faire mes livres et que j'essaie d'être aussi créatif que possible, il y a toujours une restriction. Je dois faire plaisir aux autres, je dois faire plaisir à mon directeur artistique, mon éditeur, puis il y a tout le public pour plaire. Certains des livres que j'ai considérés comme mes meilleures réalisations artistiques personnelles ne sont pas nécessairement les livres qui plaisent aux enfants. Et ça me va."

S'il a toujours beaucoup discuté avec des enfants, il disait encore: "Je garde juste le critique intérieur. Ne laissez pas le petit enfant de 4 ans se lasser. Je l'écoute. Il se tient à côté de moi et me dit: 'Non, je n'aime pas ça.' "

Quelques albums anciens.

Je ne les ai pas tous retrouvés mais "Maggy et le monstre" (texte d'Elizabeth Winthrop, illustré par Tomie DePaola, traduit de l'anglais par Catherine Deloraine, Flammarion, 1988, un an seulement après la parution originale chez Holiday House) attendait gentiment et de manière accessible dans une de mes bibliothèques. Un album absolument délicieux où la peur vespérale du monstre est détournée en une belle histoire d'incompréhension réciproque. En réalité, le monstre qui retourne toute la chambre de Maggy chaque soir cherche sa mère qui, il ne le sait pas contrairement à la petite fille, se trouve dans le placard à balais. Tout est donc bien qui finit bien pour les deux protagonistes.


"Maggy et le monstre". (c) Flammarion

"Sors de ma chambre!", crie sans succès Maggy.

Tout s'explique. (c) Flammarion.













La Coréenne Baek Hee-na lauréate ALMA 2020

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Baek Hee-na.

Jointe au téléphone ce matin par le jury du prix Astrid Lindgren pour lui annoncer ses lauriers tout neufs, la Coréenne Baek Hee-na ne comprend pas bien. La liaison est mauvaise. Au "You are the laureate" de son correspondant, elle répond "You mean I'm the winner?" avant de réaliser ce qui vient de lui être dit et de demander de continuer par mail.

C'est donc une auteure-illustratrice coréenne qui remporte cette année la plus importante récompense en matière de littérature de jeunesse (lire ici et ici). Mal connue en français puisque nous ne disposons que de trois de ses albums en traduction. Mais dans la lignée d'Astrid Lindgren, nous assure le jury du prix. Son style graphique unique présente des figurines miniatures faites à la main et des environnements soigneusement éclairés et photographiés

Née à Séoul en 1971, Baek Hee-na a étudié les sciences de l'éducation dans sa ville puis l'animation aux Etats-Unis. Après avoir travaillé dans la publicité et le multimédia pour les enfants, elle a commencé à créer ses propres livres d'images à la naissance de sa fille.

 Elle a été élue illustratrice de l'année à la Foire internationale du livre de Bologne en 2005. Elle est l'auteur de treize albums pour enfants en Corée, populaires dans toute l'Asie, et dont certains ont été traduits. Le jury a salué son travail, "porte vers le merveilleux: sensuel, vertigineux et piquant".

Trois de ses albums nous sont parvenus en traduction française.


Les petits pains au nuage
Baek Heena
Hyang-soo Kim
traduit du coréen par Claire Lanaspre
Didier Jeunesse
40 pages, 2006

Comment venir en aide à papa, terriblement en retard et coincé dans un embouteillage? En cuisinant de délicieux petits pains au nuage, pardi! Une histoire tendre et farfelue dans un quotidien citadin, au milieu des gratte-ciel. Un album inventif sur le plan graphique.


Le fil rose
Baek Hee-Na 
traduit du coréen par Yeong-Hee Lim et adapté par Michèle Moreau
Didier jeunesse
22 pages, 2010

Une petite fille s'amuse avec un fil de laine rose qui sera le fil conducteur de sa journée. Il se fait nœud pour ses cheveux et elle sort. Il se fait laisse pour son chien. Il devient corde à sauter pou jouer au square avec les copains...


Chat-Chelou
Baek Heena
traduit du coréen par Lim Yeong-hee
Picquier Jeunesse
40 pages, 2017

Lors d'une visite au poulailler, un gros matou peu recommandable vole un œuf, le gobe tout rond…et donne naissance à un poussin tout penaud. Ces deux là n'ont rien en commun et pourtant ils ne se quitteront plus. Une histoire d'amour, portée par l'originalité des personnages et la force de leurs sentiments.


La cérémonie de remise officielle, fixée au 1er juin, est reportée.

Quelques images de son travail, existant ou pas en français.

"Cloud Bread".

"Cloud Bread".

"I am a dog".

"Magic candies".

"Moon Sorbet".

"The Bath fairy".


Les lauréats ALMA précédents

2019 Bart Moeyaert (lire ici)
2018 Jacqueline Woodson (lire ici)
2017 Wolf Erlbruch (lire ici)
2016 Meg Rosoff (lire ici)
2015 Praesa (lire ici)
2014 Barbro Lindgren (lire ici)
2013 Isol
2012 Guus Kuijer (lire ici)
2011 Shaun Tan
2010 Kitty Crowther
2009 Tamer Institute
2008 Sonya Hartnett
2007 Banco del Libro
2006 Katherine Paterson
2005 Philip Pullman et Ryôji Arai
2004 Lydia Bojunga
2003 Maurice Sendak et Christine Nöstlinger

Ce n'est pas pour rien que le Astrid Lindgren Memorial Award est aujourd'hui considéré comme l'équivalent jeunesse du prix Nobel de littérature, détrônant les prix Andersen de l'IBBY de cette appellation. Avec sa dotation de 5 millions de couronnes suédoises (480.000 €), il est le prix en littérature de jeunesse le plus important au monde.



lundi 30 mars 2020

Covid-19: décès de l'illustratrice Denise Millet, inséparable de l'illustrateur Claude Millet

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Denise Millet


On a appris ce samedi 28 mars par un tweet de Pierre Millet, son petit-fils, le décès de Denise Millet, illustratrice historique de la littérature de jeunesse, toujours en duo avec son mari Claude, également illustrateur. Elle était née le 16 mai 1933. Ils étaient comme un couple d'inséparables. Ils s'étaient rencontrés lors de leurs études aux Arts Décos.

"Parmi les morts d'aujourd'hui, tués par le Covid 19, il y a ma grand-mère, Denise Millet. Elle laisse mon grand-père Claude tout seul. Et Claude et Denise Millet, vous les connaissez peut-être. C'était un peu les Canet-Cotillard de l'illustration Jeunesse il y a 20-30 ans."


"Denise était en charge des couleurs, Claude du dessin. Leur principal fait d'armes: "Pic et Pik", qui a occupé les pages d'Astrapi Magazine pendant de longues années. Ils avaient aussi dessiné une bible qu'il m'arrive de trouver parfois chez des amis."


"Mais mon préféré de tous quand j'étais jeune, c'est bien leur BD sur la vie de Martin Luther King, publiée chez Bayard Editions avec qui ils ont longtemps collaboré. Ils ont donné à mon père l'envie de dessiner."


"Denise est donc partie, et a quitté la Place de Clichy ou elle a passé toute sa vie. Je voulais lui rendre hommage."



Ci-dessous le très bel hommage que lui rendent ses amis François Place et Donald Grant.

"Notre amie Denise Millet n'est plus. Le covid-19 l'a emportée, littéralement.
Jeudi dernier, elle est entrée à l'hôpital, où nous savons tous l'extrême dévouement de ceux qui doivent faire face à l'épidémie. Samedi, elle a succombé à sa détresse respiratoire. Elle laisse désemparés et abasourdis sa famille, ses enfants et petits-enfants, et Claude, son compagnon, son mari, son amour de toujours.
Tout est allé si vite, et si brutalement.
Denise, c'était la vivacité même, une petite femme décidée, volontaire et joyeuse, avec un art de la réplique qui faisait mouche à tous les coups.
Elle avait rencontré Claude aux Arts Décoratifs, et ils ont fait ensemble toute leur carrière d'illustrateurs. Et quelle carrière!
Impossible de compter les livres qu'ils ont signés, chez Hachette, Bayard Presse, Albin Michel et Gallimard Jeunesse, sans compter les dessins publicitaires ou des affiches de films. Du documentaire historique aux histoires pour tout-petits en passant par les bandes dessinées, leur style épousait toutes les variations allant de l'hyperréalisme au trait enlevé du cartoon.
On ne peut pas dissocier le travail de Denise de celui de Claude. Ils signaient C+D Millet, et même si Claude était le plus souvent au dessin, et Denise à la couleur, le travail en cours faisait la navette plusieurs fois entre leurs mains, avec France Musique en fond sonore. Il y dans cette signature C+D Millet, l'histoire d'une fusion sans égale, d'un couple de virtuoses accordés dès le matin et qui ont connu ensemble toutes les époques de l'illustration depuis les années soixante, avec l'essor de la publicité et du graphisme, de la presse et de la littérature jeunesse.
Toute une vie à travailler à deux, depuis leur prime jeunesse jusqu'à la retraite, qu'ils ont prise fort tard.
Chère Denise, tous tes amis gardent au cœur ta joie de vivre et ton franc parler, et la tendresse de ton amitié.



Souvenirs, souvenirs, quelques titres illustrés par C + D Millet