Christian Millau. |
Souvenirs, souvenirs, en ce jour où l'on annonce le décès le 5 août dernier, à l'âge de 88 ans, de Christian Millau, gastronome, critique, journaliste et écrivain. Il était né à Paris le 30 décembre 1928.
C'était le 20 novembre 2008. Christian Millau était venu à Bruxelles présenter son "Dictionnaire amoureux de la gastronomie" (Plon). Personne n'avait pensé que c'était le jour de la Saint-Verhaegen, fête annuelle de l'Université Libre de Bruxelles, concrétisée notamment par un immense cortège bloquant en général toute la ville...
Je l'avais néanmoins rencontré lors d'un plus que délicieux déjeuner au restaurant gastronomique bruxellois "Comme chez soi" dont il connaissait très bien les patrons et le personnel de salle. Mais après ce bon moment, il avait fallu remonter du bas de la ville vers l'hôtel où il avait d'autres rendez-vous de presse l'après-midi. Comment faire?
Explications (telles que parues dans "Le Soir" de l'époque).
Circuler en voiture dans Bruxelles l'après-midi d'un 20 novembre, jour de la Saint-Verhaegen, est chose absolument impossible. Cela s'est encore vérifié quand Christian Millau a voulu remonter du bas de la ville, où il m'avait conviée à un superbe déjeuner. L'auteur du "Dictionnaire amoureux de la gastronomie" (Plon, 770 p.) tenait aussi à s'y excuser d'une coquille apparue dans son livre: le chef Lionel Rigolet y est affublé du prénom de Jean-Pierre.
La ville était donc à l’arrêt alors que l'horloge rougissait tant l'heure de ses rendez-vous avançait. Une seule issue: marcher. Et me voilà promue "escort girl" du joyeux gastronome français, 80 ans l'an prochain. De petite rue en petite rue, il est finalement arrivé à bon port sans avoir reçu ni œufs, ni bière, ni farine estudiantine.
Mais ceci n'est que broutille tant les 850 grammes de l'ouvrage de Christian Millau regorgent de notices savoureuses, nappées d’une langue élégante. "J’ai eu toute liberté pour les écrire", explique-t-il, "puisqu'il s'agit d’un dictionnaire amoureux." Qu'on y picore au gré de sa fantaisie ou qu'on prenne le menu complet, on est comblé. "La table est un lieu de civilisation et de séduction", rappelle-t-il.
Le journaliste, gastronomique comme on le sait, littéraire comme on le sait moins, pense que "tous les bons écrivains aiment manger". Et de citer Balzac, Stendhal, Zola, Maupassant et même la Bible. "Le seul auteur chez qui on ne mange pas", poursuit-il, "c'est Françoise Sagan. Ce qui est logique dans la société qu'elle décrivait."