LU & approuvé
Alphonse et Marie élèvent leur fils unique comme on le fait à l'époque, d'ordres en injonctions, d'interdictions en obligations. Une éducation rude impliquant une obéissance totale, sûre que les "tu n'y arriveras pas" sont plus efficaces que les encouragements. Rabaisser plutôt qu'élever. Le fils unique se sauve en voyant le monde tel qu'il n'est pas. "Je rêve la vie." Il fugue sans sortir de sa chambre. Philippe Herbet nous partage son enfance un peu misérable sans être dramatique. Les amies de sa mère, les bricolages du père, les visites à la famille, les promenades. En toile de fond, la société de consommation qui prend ses marques. Le "progrès" qui devient leitmotiv.
En séquences souvent courtes, le narrateur nous dit ces existences ternes dont il a gardé un souvenir très précis à défaut de photos, détruites par un père qui jette tout ce qui l'encombre. Philippe Herbet se rappelle tout, la banalité d'une vie en famille parfois piquée de disputes, les humiliations à l'école, le choix d'études amenant à un "bon métier", la question de l'orientation sexuelle, mais aussi les éclats de joie que sont des vacances dans le sud de la France ou l'acquisition d'un premier appareil photo. Lui qui s'était réfugié dans la littérature va pouvoir s'adonner à sa passion, prendre des photos. Surtout, il va s'émanciper. Rencontrer qui il veut, partir à Paris, se lancer dans la vie, voyager, photographier... Devenir qui il est, en tournant le dos à son passé. Jusqu'au moment où il réalise qu'il est capable de rencontrer enfin ses parents dans leur véracité. "Fils de prolétaire", sans "s" dans le titre, avec "s" dans le texte, est le récit impressionnant de ce chemin, écrit en mots justes jouant avec des mots rares comme andrinople ou amaxophobe.
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