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jeudi 3 novembre 2011

LD couvre Anna Boulanger

Devinette
Regardez bien ces deux dessins, extraits d'albums qui paraissent aujourd'hui.

(c) Attila.


(c) Attila.

Ils ont été faits à plus de 40 ans d'écart.

Un océan sépare leurs deux créateurs.
La seconde dit même ne pas connaître le premier.
Ou du moins qu'elle ne le connaissait pas quand elle a réalisé cette série de dessins - depuis l'éditeur le lui a fait découvrir.

Et pourtant, quel air de famille, que de points communs! Quelle réussite et quel talent chez chacun.

Les avez-vous reconnus?

En haut à gauche, un dessin de l'immense Edward Gorey (1925-2000).
En dessous, à droite, un dessin d'Anna Boulanger, tout juste sortie de l'école Saint-Luc de Bruxelles et qui a déjà un peu travaillé dans la micro-édition.

Les deux artistes sont publiés par le même éditeur, Attila.

On se souviendra que la jeune maison d'édition française a entamé la réédition d'Edward Gorey.
On avait retrouvé ce dernier avec la "Trilogie de Treehorn" (voir note précédente), sur un texte de Florence Parry Heide qui vient de mourir, déclinée en "Le rapetissement de Treehorn", "Le trésor de Treehorn" et  "Le souhait de Treehorn".



Deux autres ouvrages du génial Américain arrivent aujourd'hui en librairie.

Il s'agit de son album célébrissime en tant qu'auteur-illustrateur, "Les enfants fichus" ("The Gashlycrumb Tinies", 1963), en version bilingue (le texte est traduit pour la première fois en français par Ludovic Flamant,  un autre Belge).



Edward Gorey y dresse un catalogue alphabétique de tout ce qui peut arriver comme malheurs aux enfants, Amy, Basil, Clara...
C'est cruel, grinçant, lugubre, tout ce qu'on veut, mais jamais macabre et surtout somptueux. Un véritable chef-d’œuvre.
Ultra-célèbre aux Etats-Unis, le livre a notamment inspiré Tim Burton pour "La Triste fin du petit enfant huître et autres histoires" (10/18). Chaque page de l’abécédaire est construite comme un vers de dix pieds; ils sont rimés deux à deux. La traduction française les a transposés en alexandrins, plus proches de notre oreille. Quant aux dessins, en noir et blanc, minutieux, splendides, ils donnent une bonne idée du côté irrévérencieux, et donc combien nécessaire, de leur auteur.
Pour s'en faire une idée, une vidéo à voir sur http://goo.gl/mkTaI


L'autre album illustré par Edward Gorey qui paraît chez Attila est "Les histoires de Donald" (textes de Peter F. Neumeyer, traduits par Oskar). C'est de celui-ci que provient l'image tout en haut.


Deux contes américains datant de 1969 et 1970 y sont rassemblés, complètement à hauteur d'enfant. Dans le premier, il s'agit du sauvetage d'un ver blanc par Donald et sa maman. Dans le second, du retrait d'une écharde du genou de Donald par sa maman. A première vue, cela n'a l'air de rien, mais ce sont de fantastiques univers que déploient l'auteur et l'illustrateur.

L'album est conçu par doubles pages, celles de gauche, noires, accueillant le texte, celles de droite, proposant les délicates illustrations. Quel tremplin pour l'imagination et la fantaisie!C'est exactement dans cette veine, imaginaire et technique, que s'inscrit Anna Boulanger (revoir la deuxième image plus haut)."Le Haret québécois et autres histoires", son premier album, paraît aujourd'hui aux éditions Attila.

Un petit bijou surréaliste, tout en hauteur.
Ses cinq histoires sont nées de mots collectionnés en listes, ordonnés et désordonnés jusqu'à ce que naissent des images. Des images qui sont devenues des dessins, des mots qui sont devenus des phrases.
Au lecteur d'alors intervenir!









Une exposition Boulanger
Une partie des originaux d'Anna Boulanger apparaissant dans l’ouvrage
"Le Haret québécois" ainsi qu'une suite d'autres dessins, sont actuellement exposés chez Brüsel (100 boulevard Anspach,  1000 Bruxelles), et ce jusqu'au 23 novembre.
Vernissage ce jeudi 3 novembre à 19 heures en présence de l'artiste.
Sera également projetée  à cette occasion une version animée des "Enfants fichus", en présence du traducteur de l'album, Ludovic Flamant.

Un concours Gorey
Les éditions Attila organisent aussi un concours de traduction libre sur les "Enfants fichus" d'Edward Gorey.
Il est ouvert à tous les lecteurs, polyglottes (ou non), en âge de lire (ou pas), Goreymaniaques (ou en devenir),
amateurs de contraintes (surtout), prosateurs ou poètes, âgés de plus ou de moins de 18 ans, sans obligation d’achat.
"The Gashlycrumb tinies", qui fait l’objet du concours, cet abécédaire d’enfants malchanceux, est disponible en version originale (Bloomsbury) et en version bilingue (Attila).
Les lecteurs sont invités à traduire - ou réinventer - le texte des "Gashlycrumb tinies", titre compris, sans contrainte métrique, ni rythmique, ni onomastique, et à envoyer leur traduction par mail (info@editions-attila.net), courrier (16 rue Charlemagne, 75004 Paris), facebook ou dans les librairies participantes, du 6 novembre au 31 janvier 2012.


Un jury réunissant les amis d’Attila se réunira pour le Carnaval (21 février) afin de procéder à une sélection. Les gagnants recevront une surprise du catalogue attilesque.
Une anthologie des traductions les plus inventives apparaîtra sur le site internet de la maison d’édition.



2 commentaires:

  1. Je ne crois pas une seule seconde qu'elle ne connaissait pas Gorey. C'est du pillage intégral. J'ai rien contre au fond mais qu'elle n'essaie pas de faire avaler des couleuvres pareilles. Elle sort de Saint-Luc et personne ne lui a jamais dit qu'elle avait une ressemblance plus que troublante avec Gorey ? Elle fait de l'illustration et elle ne connaît pas Gorey ? Elle va chez Attila sans regarder le catalogue avant et voir la ressemblance ? A saint-Luc les profs ne sont pas si incultes qu'aucun ne lui ai jamais fait la remarque. C'est impossible. Elle a pompé un "univers", jusqu'au format des dessins parfois, l'ambiance, la mise en page, les frontalités, les lignes d'horizon, la façon de croiser le trait ou de ne pas le croiser pour montrer les textures, les profils des personnages, les proportions des personnages... bref, c'est plus que du hasard... Il y a d'autres exemples récents... je veux bien comprendre qu'on soit influencé mais de là à même nier ça, tout de même...

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  2. Cher Monsieur Pittau,

    Il est déroutant de vous lire. Vous énoncez vos pensées avec une telle assurance, voire violence, qu'elles m'ont fait douter un instant des miennes. Mais, en tant qu'éditeur d'Anna Boulanger (et, d'ailleurs, d'Edward Gorey), je dois néanmoins vous apporter quelques précisions qui, je le crains, risquent de mettre à mal vos certitudes.

    1. il ne faut pas confondre date de création et date de publication
    Si les dessins du Haret québécois ont été publiés en 2011, certains d'entre eux ont été dessinés bien des années plus tôt. A une époque où, de fait, Anna Boulanger ignorait l'œuvre d'Edward Gorey et l'existence des éditions Attila (puis qu'elles n'existaient pas encore).

    2. les professeurs de Saint-Luc, je vous le confirme, ne sont pas incultes
    Du moins pour l'un d'entre eux, remarquablement cultivé, qui a été le professeur d'Anna Boulanger et lui a fait connaître l'existence d'Edward Gorey. J'en sais quelque chose, puisque c'est un ami.

    3. la culture, cela se partage
    Si la technique de Gorey est somptueuse, on ne peut pas tout à fait lui en attribuer l'exclusivité, ni même la paternité, y compris pour le format de ses dessins. Comme me le faisait humblement remarquer Anna sur son propre travail, l'histoire de la gravure est très riche d'enseignement et de maîtres prodigieux.

    4. la culture, cela se partage (bis)
    Je m'étonne que vous n'ayez pas accusé Anna Boulanger d'avoir aussi plagié le style littéraire d'Edward Gorey. A tout hasard et à titre préventif, je signale que ces deux auteurs partagent de fait un même amour pour la littérature du non-sens, Raymond Queneau et l'Oulipo. C'est une maladie heureuse, que je me flatte aussi d'avoir, comme quelques brassées d'autres gens.

    5. l'enthousiasme, c'est dangereux
    Ayant eu la chance de pouvoir expliquer tout cela à l'oreille aiguisée de Lu Cie&Co, j'avoue piteusement que ma joie et le déluge de mots qui s'ensuivit ont dû l'étourdir un peu. D'où cette petite erreur dans le blog sur l'identité la personne ayant appris à Anna Boulanger l'existence d'Edward Gorey : un professeur, et non un éditeur. Un simple courriel adressé à la maison d'édition avant l'envoi de votre commentaire-fatwa vous aurait permis d'obtenir cet utile éclaircissement et d'éviter des termes franchement malheureux.

    6. les mots, c'est délicats
    Car présenter Anna Boulanger comme l'auteur d'un « pillage intégral », une « pompeuse d'univers », une négatrice, c'est bien plus qu'une insulte : une incongruité. Pour ceux qui la connaisse, votre opinion est à peu près aussi exotique que si vous vouliez nous convaincre que Gandhi était un chippendale afghan reconverti et Comte Sponville le plus grand pâtissier de notre temps. Il vous suffira pour vous en persuader, de rencontrer Anna Boulanger au gré des hasards de ce monde qui, vous l'aurez maintenant deviné, sont nombreux. C'est en tout cas tout le plaisir que je vous souhaite.

    Bien cordialement,

    Frédéric Martin
    Editions Attila

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