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mercredi 28 août 2019

Quatre finalistes féminines au prix du roman Fnac



La lauréate du prix du roman Fnac 2019, le dix-huitième, sera connue le 2 septembre. "La" lauréate car les quatre finalistes révélées ce 28 août sont de sexe féminin. Elle succédera à Adeline Dieudonné récompensée l'an dernier pour son premier roman "La Vraie Vie" (L'Iconoclaste, lire ici), écoulé à 160.000 exemplaires depuis sa parution (source Gfk).

Les 400 libraires et 400 adhérents Fnac composant le jury du Prix ont présélectionné mi-juillet  trente livres de la rentrée littéraire 2019. Ce jury a choisi aujourd'hui ses quatre romans finalistes. Trois francophones et une traduction.

  • "De pierre et d'os", de Bérengère Cournut (Le Tripode), présenté à l'Intime Festival de Namur le week-end dernier (lire ici).
  • "Murène", de Valentine Goby (Actes Sud)
  • "Eden", de Monica Sabolo (Gallimard)
  • "Girl", d'Edna O'Brien (traduit de l'anglais par Aude de Saint-Loup et Pierre-Emmanuel Dauzat (Sabine Wespieser)















Le Prix du Roman Fnac 2019 sera remis lors de la soirée d'inauguration du Salon Fnac Livres par l'écrivain américain Bret Easton Ellis, invité d'honneur, le vendredi 20 septembre à 17h30. Pour sa quatrième édition, ce salon se déroulera du vendredi 20 septembre au dimanche 22 septembre à la Halle des Blancs Manteaux, Paris IV. Il accueillera près d'une centaine d'auteurs, présents en cette rentrée littéraire (entrée gratuite).


mardi 27 août 2019

De l'essence, des sens et bien des plaisirs

Edward Hopper, "Gas", 1940.

On pensait que le prix du roman Fnac (dont les 4 finalistes seront annoncés demain 28 août) ouvrait le bal annuel des récompenses littéraires. Raté pour 2019.
Un nouveau prix, le "G7 littéraire - Maison rouge" devient en effet le premier prix littéraire de la saison. Décerné à Biarritz le 20 août, juste avant le G7, et peut-être cette récompense sera-t-elle ce qui restera de mieux de ce sommet, il a été attribué au premier roman "Chroniques d'une station-service!", du Français Alexandre Labruffe (Verticales, 141 pages). L'auteur, 45 ans, qui se partage entre littérature et cinéma s'est dit "Emu, honoré, ravi, amusé!"

La Maison Rouge, Biarritz.
Le prix a été créé cet été par sept écrivains et artistes, qui se qualifient eux-mêmes de "G7 littéraire", et par la Maison rouge, un espace de travail et d'événements culturels à Biarritz. Présidé par Philippe Djian, le jury est composé de Frédéric Beigbeder, Frédéric Schiffter, Isabelle Carré, Dominique de Saint Pern, Jean Le Gall, Claude Nori et Diane Ducret. Huit personnes donc. Cherchez l'intrus. "Le Prix Maison Rouge est autant une distinction littéraire qu'un état d'esprit avide de liberté, de spontanéité et de fantaisie", a déclaré Philippe Djian. "Sa vocation est de sortir des circuits parisiens et de s'autoriser à juger et apprécier sans contrainte."


Alors, ce premier roman? Hé bien, "Chroniques d'une station-service" est aussi surprenant que plaisant. Par le choix du sujet (même s'il n'est pas le premier) comme par le ton (même s'il n'est pas le premier non plus). Alexandre Labruffe a opté pour la forme de notules numérotées (de 1 à 189, avec quelques bis, ter et quater, et de A à I comme pour laisser du champ à sa fin ouverte). La plupart sont extrêmement courtes et consignent ce qui se passe ou ne se passe pas dans cette station-service de Pantin, centre du monde à elle toute seule.

Le narrateur nous fait découvrir qui il est, un "pompiste déphasé, qui fait tout sauf gérer sa station-service". Heureusement pour nous car il nous partage son regard aigu, son sens de la formule, sa parole drôle ou acide, son imagination débordante. En résumé, il nous glisse sa vision du monde à travers ses clients et ses habitués, métronomes de cette vie où l'horloge ne semble jamais s'arrêter, une fine analyse de notre société. Entre rêves d'amour et/ou d'érotisme, passages à l'acte ou non, passages à suspense, blancs et trous noirs, ce premier roman procure un grand plaisir de lecture, grâce à une écriture inventive qui a su savamment doser ses effets.

Piles et liste, c'est bien l'heure du service de presse.
En juin pour Alexandre Labruffe.


vendredi 23 août 2019

Déjà la septième édition de l'Intime Festival!


Quand Benoît Poelvoorde a lancé en 2013 son projet de festival littéraire à Namur, le temps d'un week-end à la toute fin de l'été, il a été accueilli par des mines en apparence réjouies mais au fond largement dubitatives. Il avait pourtant rudement bien vu car l'Intime Festival s'est tout de suite imposé dans le calendrier de la rentrée littéraire, prenant sa place dans des agendas souvent bien chargés. Venant de Namur et d'ailleurs, le public est friand de ses lectures, par des acteurs, par les auteurs eux-mêmes, des rencontres avec les écrivains ou entre lecteurs tout simplement, le tout dans le cadre champêtre du Théâtre de Namur. Il faut dire que la programmation de Chloé Colpé est excellente et que les déclinaisons de la littérature vers le cinéma, la photographie, l'illustration ou la musique passionnantes.

Mathieu Amalric lira "Le lambeau" de Philippe Lançon.

Ces 23, 24 et 25 août, ce soir donc, va se tenir la septième édition de l'Intime Festival. Enfin, surtout samedi et dimanche, ce vendredi soir étant consacré à la lecture  de "Un membre permanent de la famille" de  Russell Banks (douze nouvelles traduites par Pierre Furlan, Actes Sud, 2015, Babel 2016), par Jackie Berroyer.

Au programme du week-end


Cinq autres grandes lectures
  • "Trouble" du Belge Jeroen Olyslaeghers (traduit du néerlandais par Françoise Antoine, Stock, 2019), lu par Johan Leysen,
  • "Fuki-No-Tô" d'Aki Shimazaki, Japonaise installée au Québec et écrivant en français (Actes Sud, 2018), lu par Valérie Bonneton,
  • "De pierre et d'os", second roman de Bérengère Cournut (Le Tripode, à paraître le 29 août 2019), lu par Marianne Denicourt
  • "Tout ce que nous allons savoir" de Donal Ryan (traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Marie Hermet,  Albin Michel, "Terres d'Amérique", 2019), lu par Jeanne Dandoy 
  • "Le lambeau" de Philippe Lançon (Gallimard, 2018), lu par Mathieu Amalric en soirée finale.
On le voit, le choix est éclectique: grands auteurs, comme Banks ou Shimazaki, découvertes comme Olyslaeghers, apparu à la Foire du livre de Bruxelles 2019 ou Bérangère Cournut, incontournable comme Lançon, justement récompensé par le prix Femina 2018. Des écrivains francophones ou des traductions. De grandes maisons d'édition et des petites.

Des lectures d'un quart d'heure par un comédien suivies d'entretiens par un modérateur avec les auteurs
  • Florence et Jacqueline Aubenas, "En France" (L'Olivier, 2014, lire ici)
  • Yamina Benahmed Daho, "De mémoire" (Gallimard, "L'arbalète, 2019)
  • Patrick Corillon, "Le voyage en Belgique" (Robert Laffont, "Bouquins", lire ici)
  • Bérengère Cournut, "De pierre et d'os" (Le Tripode, à paraître le 29 août 2019)
  • Charly Delwart, "Databiographies" (Flammarion, à paraître le 28 août)
  • Simon et Capucine Johannin, "Nino dans la nuit" (Allia, 2019)
  • Lisa Harding, "Abattage" (traduit de l'anglais par Christel Gaillard, Joëlle Losfeld, 2019)
  • Lieve Joris, "Fonny" (traduit du néerlandais par Marie Hooghe, Actes Sud, 2019)
  • Samy Langeraert, "Mon temps libre" (Verdier, 2019)
  • Jeroen Olyslaeghers, "Trouble" (traduit du néerlandais par Françoise Antoine, Stock, 2019)
  • Donal Ryan, "Tout ce que nous allons savoir" (traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Marie Hermet,  Albin Michel, "Terres d'Amérique", 2019)

Deux discussions présentant un livre par un autre biais que son auteur:
  • "Mais leurs yeux dardaient sur Dieu", de Zora Neale Hurston (traduit de l'anglais par Sika Fakambi, Zulma, 2018), avec la traductrice Sika Fakambi 
  • "Hontes. Contes, confessions impudiques mises en scène par les auteurs", de Robin Robertson (traduit de l'anglais par Catherine Richard, Joëlle Losfeld, 2006), avec Denis Saint-Amand, Robert McLiam Wilson et Joëlle Losfeld.

Sans oublier, en l'absence de Ahmet Altan, écrivain et journaliste turc emprisonné à perpétuité depuis 2016 dans son pays, lecture de son livre à paraître le 4 septembre, (traduit du turc par Julien Lapeyre de Cabanes, Actes Sud)

D'autres choses encore:
  • Peut-on apprendre à écrire?
  • Rencontre avec Juan Branco
  • Du théâtre
  • De la musique
  • De la photo
  • Du cinéma
  • De l'architecture

Autres renseignements ici.

mardi 6 août 2019

Tristesse que le décès de l'immense écrivaine américaine Toni Morrison

Toni Morrison. (c) François Guillot/AFP.

On savait Toni Morrison malade depuis quelque temps. La triste nouvelle de son décès, le 5 août, à l'âge de 88 ans, au Montefiore Medical Center de New York, vient de tomber par un communiqué de sa famille ("Toni Morrison est décédée paisiblement la nuit dernière, entourée de sa famille et de ses amis") et par un tweet de son éditeur Alfred A. Knopf. L'écrivaine afro-américaine était née Chloé Ardella Wofford le 18 février 1931 à Lorain dans l'Ohio (USA) dans une famille ouvrière de quatre enfants. Romancière, professeure de littérature et éditrice américaine, elle a été lauréate du Prix Pulitzer en 1988 pour "Beloved", et, surtout, en 1993, l'année qui suit la publication de "Jazz", la huitième femme et la seule auteure afro-américaine à recevoir le prix Nobel de littérature.

Son œuvre magnifique, parfois complexe d'approche, d'une générosité et d'une inventivité folles, a rendu aux Afro-Américains leur passé et leur mémoire, pas seulement leurs souffrances mais aussi  leurs richesses. Toni Morrison avait une langue travaillée, rythmée, ancrée dans les mythes, jouant l'humour ou le mystère, attentive à la justice et aux droits humains, d'une beauté subjuguante et d'un romanesque parfait. Elle a été superbement traduite en français, par Christine Laferrière notamment et publiée essentiellement chez Christian Bourgois.


Toni Morrisson à Vincennes en 2012.
(c) Frédéric Guina.
Toni Morrison avait été l'invitée d'honneur du festival America de Vincennes en 2012. J'avais eu l'honneur et le plaisir de l'y rencontrer. Ici le lien pour relire l'interview qu'elle m'avait accordée. Elle y parle de son roman "Home" qui venait de sortir, de son écriture, de ses choix et de ses références. Elle explique aussi pourquoi ses romans sont devenus plus courts au fil des ans.



Un de ses romans le plus connu est "Beloved" (traduit de l'anglais (États-Unis) par Hortense Chabrier et Sylviane Rué, Christian Bourgois, 379 pages, 1989, 10/18 pour la version poche), tragédie d'une mère qui tue sa fille pour qu'elle échappe à l'esclavage.

Mais les débuts n'ont pas été faciles. Son premier roman, "L'Œil le plus bleu" (traduction nouvelle de Jean Guiloineau, Christian Bourgois, 1994) touchante histoire d’une petite fille noire qui rêve de ressembler à Shirley Temple, paraît aux Etats-Unis en 1970. Le second, "Sula", est sélectionné pour le National Book Award. C'est avec son troisième roman, sorti en 1977, "Le Chant de Salomon" (traduit de l'américain par Jean Guiloineau, 472 pages, Christian Bourgois), ample saga sur le retour au Sud et aux racines couronnée par le National Book Critic Circle Award, que Toni Morrison accède à la célébrité.


Depuis cette interview, elle avait publié son onzième roman, "Délivrances" (traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Christine Laferrière, Christian Bourgois, 180 pages, 2015), se déroulant à l'époque actuelle et décrivant des personnages longtemps prisonniers de leurs souvenirs et de leurs traumatismes avant de se délivrer des mensonges et de se reconstruire.


Ses derniers livres en date sont "L'origine des autres" (traduit de l'anglais par Christine Laferrière, Christian Bourgois, 110 pages, 2018), une série de six conférences prononcées à l'université de Harvard en 2016, où Toni Morrison analyse les arguments du racisme afin d'établir et d'entretenir la domination d'une seule catégorie d'individus. Des récits d'esclaves à l'évocation des lynchages et des récentes violences policières, l'auteur démontre que la "définition de l'inhumain" censée justifier le sadisme de "l'asservisseur" ne saurait en vérité s'appliquer qu'à celui-ci.

Toni Morrison l'an dernier. (c) Pascal Lemaître.



Et "Entre vos mains", illustré par Pascal Lemaître (traduit par Benoîte Dauvergne, L'Aube, 2018), le discours qu'elle a prononcé au moment de recevoir le Prix Nobel à Stockholm.


Toni Morrison était aussi l'auteur de livres pour enfants, avec son fils Slade Morrison (qui meurt en 2010 à l'âge de 45 ans), "Le vieil homme ou le serpent" et "La cigale ou la fourmi", illustrés par le Belge Pascal Lemaître qui l'a souvent rencontrée à New York (Casterman, 2004).

Aussi "Tout ce qu'il faut savoir sur les méchants" (Milan Jeunesse, 2007) et "Ma liberté à moi" (Gallimard, 2003)