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mercredi 14 novembre 2012

LA testé la Foire de Brive (2)

Où en était-on?
Ah oui, à l'arrivée du train en gare de Brive.
Autocars vers les hôtels et arrivée à la Foire du livre. La 31e. Elle est née en 1981.

Journal de Foire

Vendredi 9 novembre

15 h 30

J’arrive à la Foire du Livre. Un monde incroyable. Pire que la rue Neuve de Bruxelles un jour de soldes. Et on me dit que ce n’est rien par rapport au week-end - info qui se vérifiera le samedi.
Les stands s’alignent par maisons d'édition, annonçant les noms des auteurs. Bigre, au début de l'allée, je n'en connais aucun. Je me rassure en me disant que la Foire en accueille 400, dont de nombreux écrivains régionaux. Et que la Corrèze est très loin de Bruxelles. Et je continue à avancer.
Quelques mètres plus loin, ouf, je me sens mieux. Je respire. Les noms affichés me ont familiers.J'ai souvent lu les livres, parfois rencontré ceux qui les ont écrits.


15 h 45
Derrière sa pile de livres et sous son affichette, chacun sourit et se montre disponible pour le public qui est parfois venu de loin, attend "son" ou "ses" auteurs et entend bien discuter avec lui ou eux.
Viktor Lazlo est ainsi là avec son deuxième roman, "My name is Billie Holiday", et elle n'est pas seule de la troupe Albin Michel.

 



16 h 02
Gilles Paris est également présent avec son "kangourou", raccourci de son dernier roman en date, "Au pays des kangourous"."J’aurai fait 90 déplacements pour ce livre C’est normal puisque je publie un livre tous les dix ans, on m’a oublié. Mais en décembre, j’arrête. Parce que je  veux recommencer à écrire."




16 h 27
Un inconnu m’aborde : "Connaissez-vous mon livre ? C’est une bombe !" Ben non, je ne le connais pas mais je vais vite apprendre. Didier Doucet s’autopromotionne et aborde chaque passant(e) pour lui présenter avec énergie "3 points, c’est tout" (Ed. du  Valleroy), brandissant argumentaire et coupures de presse. C'est pas samedi le marché local?

16 h 34
Tiens, Antoine Gallimard s'est changé depuis le voyage en train. Il s'est mis en costume. L'ancien président de la Foire trône dans son stand, pas loin de "Pépito", absent de la photo.Où trouve-t-il donc des cravates pareilles?





17 h
Grande agitation partout : Erik Orsenna ouvre officiellement la Foire en parcourant les allées. Il est accompagné d’une grande blonde, qui excite beaucoup le public. Plus que lui même. C’est Valérie Trierweiler, la compagne du président François Hollande qui représente celui qui était à Brive l’an dernier.




17 h 50
Fini de se balader. Il est temps de passer à la cérémonie. Valérie Tr. s'installe au premier rang. Les officiels prennent place sur le plateau, dont la Ministre française de la Culture, Aurélie Filipetti, auteure elle aussi.
Les discours politiques s'enchaînent: "Chère Aurélie, chère madame la ministre, cher monsieur le..., cher monsieur le..." Vont-ils finir un jour?
Oui, c'est fini pour eux. Changement de ton jusqu'à la fin de la cérémonie.
Elle, les cheveux lâchés, ravissante dans un ensemble noir et pull rose vif à manches courtes et col montant, se lance dans un discours simple, intelligent et intéressant: "Je ne suis jamais venue à Brive en tant qu’écrivain, c’est presque une session de rattrapage pour moi  aujourd’hui." Pas d'Orient-Express pour son déplacement, mais un avion, plus rapide.
Elle rappellera ensuite clairement l’importance du livre et de la chaîne qu’il organise, de l’auteur au lecteur en passant par l’éditeur et le libraire. Et ajoutera: "Je ne ferai jamais partie de ceux qui disent qu’il y a trop de livres publiés chaque année."
Si tous les officiels pouvaient parler de manière telle qu'on les écoute...

18 h 25
Vassilis Alexakis s’ajoute discrètement sur l’estrade qu’avait tout aussi discrètement rejointe un peu plus tôt Bernard Pivot.

18 h 35
Erik Orsenna, malicieux président de l’édition 2012, prend la parole: "Mon rêve secret était d’être appelé trois jours président. Un bonheur que je ressens surtout en Corrèze. Dimanche soir, je reviendrai à ma citrouille mais je ne laisserai pas une seconde aux autres, je serai président jusqu’au bout."
Il explique la programmation à laquelle il a participé: "J’ai choisi le thème du voyage qui permet de comprendre le monde, de trouver notre place et de se rendre compte qu’il y a plus de vies qu’on ne le croit dans une vie."
Pour lui, la géographie est multidisciplinaire: "Etre spécialiste ne suffit pas, il faut croiser les regards." Elle est liée  à la question des territoires: "Il y a des endroits de péril à ne pas oublier. Je reviens du Niger et du Mali. Il s’y institue une zone de non-droit où règnent des bandits qui nous menacent. Il faut aussi réfléchir à l’agriculture, à la manière de produite de manière à nourrir 9 milliards d’êtres humains sans détruire la Terre. Mais la lucidité ne nous empêchera pas d’être heureux. Plus on est heureux soi-même, moins on emmerde les autres."

Annonçant la soirée avec Jeanne Cherhal, il dit aussi son admiration pour le chant. "Des chansons comme "La Javanaise" ou "Ne me quitte pas" sont deux fois trois minutes qui valent un certain nombre de nuances de Grey. Et si vous voulez d’autres titres de ce domaine, demandez-moi, j’ai une bibliothèque secrète."

En finale, le président fait son professeur donne un cours de vocabulaire, sur l’origine du mot "curieux": "Il vient du latin "cura", soin. Je vous souhaite de bons voyages. Ce sont les gens curieux qui prennent soin du monde."

18 h 50
Francis Esménard, patron d'Albin Michel, s'approche du micro pour rendre un touchant hommage à Robert Sabatier, décédé le 28 juin. Il n’a rien préparé et concocte avec Bernard Pivot un savoureux duo, entre anecdotes et poèmes dont était spécialiste l’auteur de la trilogie "Les allumettes suédoises", "Trois sucettes à la menthe" et "Les Noisettes sauvages", qui vient d’être rééditée.
Le portrait est précis, tendre et ne donne qu’une envie : redécouvrir le romancier et le poète, puits de science doublé d’un gourmand de la vie et de la fête. "A la table des Goncourt, rappelle Bernard Pivot, il pouvait passer d’une poésie à une histoire grivoise." 
Le public est conquis.

19 h 15
Le Prix de la langue française est officiellement remis à Vassilis Alexakis : "Je n’ai jamais l’impression de faire une prouesse en écrivant en français. Depuis trois décennies, j’écris mes livres deux fois, en français et en grec. J’écris d’abord dans la langue de mes personnages. Si c’est une concierge parisienne, c’est en français. Si c’est un pope, c’est en grec."
"J’ai toujours l’impression de vivre à l’écart de mon ombre. Comme celle de l’avion que je vois quand j’arrive à Athènes ou à Paris. Avec ce prix, j’ai l’impression d’avoir enfin rejoint mon ombre."




20 h
La Foire ferme ses portes. Les auteurs et leurs éditeurs partent se sustenter dans différents  restaurants où chacun a ses habitudes. Pour moi, ce sera œuf  poché sur légumes anciens, coquilles Saint-Jacques et crème brûlée, à la vieille prune évidemment.  Mais la soirée ne s’achève pas avec le café.
Il y a le Cardinal, étape obligée pour toute personne liée à la Foire ! Je découvre la boîte de nuit locale, célébrée par tous les médias. Lumières rouges, sièges de velours cracra et pistes de danse, dont une devant un mur à la tapisserie de faux livres. La musique est atroce, ni oldies, ni actuelle, juste le pire des années 80. Mais il faut en être, se déhancher jusqu’au petit matin, Brivistes, auteurs, éditeurs et journalistes confondus, et boire jusqu’à plus soif. Tant de choses s’y sont passées, murmurent les anciens. Christine Angot en a même fait un roman. Quel sera le potin 2012?



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