Sophie la girafe, une star mondiale. |
C'est justement au troisième étage de ce château de contes de fées bruxellois que se tient en ce moment une fort plaisante exposition.
"Des jouets qui font POUET!" est consacrée à Sophie la girafe, la reine des jouets "pouet" et à tous ses copains de caoutchouc, de vinyle et de PVC. Vous savez bien, ces jouets qui accompagnent la petite enfance, qu'on donne dès le berceau ou pour le bain, avec lesquels les enfants s'exercent à la découverte ses sons et qui sont souvent récupérés ensuite, et mis sous vitrine, par quelques adultes collectionneurs.
On l'a compris, l'appellation "pouet" réunit les jouets qui font du bruit quand on les serre dans la main. En français, ils font "pouet". En néerlandais, ils font "piep". En anglais, on parle de "squeaky toys". Fabriqués pour représenter l'air du temps de la société, ils permettent une véritable étude sociologique de leur âge d'or, la seconde moitié du siècle dernier. Si on admire leur réalisation, on ne peut que constater combien tous les poncifs d'un temps y sont omniprésents.
"La rénovation de la Porte de Hal en 2008 permet
dorénavant d’accueillir au troisième étage des expositions temporaires sur le folklore
auquel appartiennent les jouets", m'explique Linda Wullus des Musées royaux d’art et d’histoire.
Un ouvrage riche de mille informations peu connues et d'autant plus passionnantes.
Les 101 dalmatiens, produits de 1961 à 1963. (c) DISNEY. |
Casimir, pouet à tête pivotante produit de 1974 à 1982
(c) C.IZARD / Y.
BRUNIER – Une licence Osibo Productions.
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Gédéon, pouet réalisé en
1977.
Reproduction
photographique avec l’ autorisation des Amis de Benjamin Rabier.
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Hello
Kitty, 1994 |
"Plusieurs thèmes ont été définis", ajoute Linda Wullus (KMKG-MRAH), "contes, cirque, animaux, enfance des bébés, rôles hommes-femmes ou garçons-filles, poupées folkloriques. On rencontre des silhouettes connues, venues des bandes dessinées, des séries télévisées ou de Walt Disney mais on fait aussi de réelles découvertes, comme les "jouets pouet" dus au Tchèque Libuse Niklová, les "pouets à roulettes" ou les "pouets russes" aux dessins naïfs et dont le prix en kopecks est gravé dans le caoutchouc!"
Rares pouets de l’ex-URSS réalisés vers 1965-1970.
Les "jouets pouet" sont anonymes ou le fruit du merchandising. Walt Disney concède des licences par pays. Les enfants les découvrent dans des vitrines basses à leur hauteur. Il faut les voir reconnaître Pierre Lapin, Nounours, Babar, des héros de la TV et de la BD (Tintin, Astérix, Marsupilami, Schtroumpfs), ou s'interroger sur les animaux amoureux de Peynet, ou sur un petit Bouddha…
A noter que le premier "pouet" est un Jiminy Cricket, que les formats sont plus grands quand ils viennent d'Italie, que les "pouets" belges sont plus petits et plus simples.
Les années 1970 voient arriver en masse les jouets éducatifs "intelligents" de Fisher Price et Kiddicraft, et envoient le "jouet pouet", trop simple, dans les cordes. Il en apparaît encore mais beaucoup moins. Aujourd’hui les "jouets pouet" se sont recyclés dans les jouets de bain, mais sans sifflet, alors que la condition pour être un "jouet pouet" est qu’il y ait un sifflet.
"Les jouets pouet n’intéressent pas les collectionneurs parce qu’ils ne sont pas composés de matériaux nobles", dit la collectionneuse Isabelle Lecomte. "J’ai été attirée par leur côté populaire, bon marché, souvent mal vu, mais surprenant par leur variété. Quand j’ai acheté mon premier jouet pouet, j’ai craqué et c’est devenu une passion. Malheureusement le caoutchouc est très fragile, le vinyle un peu moins. Mes jouets viennent des quatre coins du monde. J’ai aujourd’hui 2000 pièces et ma collection augmente de jour en jour. J’achète beaucoup par internet. Le collectionneur pense toujours à ce qu’il n’a pas, à la série qui lui manque. Internet permet des recherches précises."
En effet, le "jouet pouet" nous dit l’enfance au XXe siècle. Le public est large, familial, comprenant les tout-petits. Le "jouet pouet" est souvent le premier contact du bébé avec les objets. L’exposition présente les ancêtres des jouets qui font du bruit, les jouets sur soufflets, les hochets, réalisés en papier mâché et en bois. Le "jouet pouet" présente la difficulté qu’il est à la fois une poupée et un jouet qui fait du bruit.
Différentes cellules didactiques montrent la fabrication du "jouet pouet", avec la confection du moule en bronze où est coulé le caoutchouc, le fait qu’il est un miroir de la société, notamment dans la répartition des rôles masculin-féminin, surtout dans les années 50-60, et expliquent sa disparition à cause de l’apparition de l’électronique.
On ne se doute guère que Sophie la girafe est devenue une star mondiale. Haute de 18 cm, elle est née le 25 mai 1961, jour de la Sainte-Sophie et a déjà été vendue à plus de trente millions d'exemplaires. Un site lui est même consacré.
Après la visite, une séance de jeu avec des "jouets pouets" est possible au grenier de la Tour de Hal: livres, maison de poupées, coloriages, magasin attendent les jeunes visiteurs.
Et ceux qui n'en ont pas vu assez se plongeront avec délices dans le catalogue très abondamment illustré de l'exposition qu'a rédigé Isabelle Lecomte. L'ouvrage bilingue (FR-NL) remonte aux années 1930 et présente toute histoire du "jouet pouet". Les notices sont passionnantes et sont complétées de nombreux documents, photos anciennes, extraits de catalogues
L'exposition se tient à la Porte de Hal tous les jours sauf le lundi jusqu'au dimanche 15 juin. Infos pratiques ici.
Elle ira ensuite à Gand (Huis van Alijn), du 6 décembre au 22 février 2015.
Merci ! ;-)
RépondreSupprimerMerci ce récit est excellent !!!
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