Étienne Delessert. |
Incroyable! Étienne Delessert
a perdu un combat. L'énergique auteur-illustrateur suisse est décédé des
suites d'un cancer dans la nuit de dimanche à ce lundi 21 avril à Lakeville
(Connecticut). Il avait fêté ses 83 ans début janvier. L'artiste, créateur du
célèbre personnage de Yok-Yok, résidait avec son épouse américaine, la
graphiste et éditrice Rita Marshall, aux Etats-Unis depuis près de 40 ans
(1985). Une incroyable maison où chacun avait son atelier (lui dans le
grenier, elle dans le jardin) et où a grandi leur fils Adrien, 36 ans, la
prunelle de ses yeux, aujourd'hui ingénieur en informatique.
Étienne Delessert, ce sont mille vies en une. Un talent d'artiste inouï qu'il
a développé en autodidacte à travers plus de 80 livres, "Yok-Yok" bien entendu
mais tant d'autres aussi, sans compter les diverses illustrations, peintures
et sculptures. Un plaisir immense de prendre et reprendre ses pinceaux pour
des créations magnifiques. Une énergie peu commune entièrement tournée vers
l'aboutissement de ses multiples projets, livres, amitiés, amours, enthousiasmes professionnels. Une détermination inébranlable à sauver et à
défendre la beauté, la complexité, l'exigence, à pourfendre la mièvrerie.
Figure essentielle de la littérature de jeunesse telle qu'on la connaît,
Étienne Delessert a séduit les enfants par son œuvre juste, honnête,
généreuse, même si peu conventionnelle d'apparence. Avançant en âge, il s'y
est même confié, lui, l'homme secret, dans une dimension universelle. Pilier
de l'édition jeunesse, il a été un acteur et un témoin de tout ce qui a marqué
le genre. Ce n'est pas pour rien qu'il a voulu sauver le site français
Ricochet et qu'il y est parvenu (lire
ici), créé par Janine Despinette (lire
ici). Ce n'est pas pour rien qu'il a créé en 2017 "Les Maîtres de l'imaginaire",
réunissant les archives des meilleurs artistes mondiaux de la littérature de
jeunesse (lire
ici).
Étienne Delessert, c'est un auteur-illustrateur que j'ai rencontré "pour de
vrai" très tardivement, en 2009, lors de son exposition à Moulins, même si
j'avais lu et chroniqué dans "Le Soir" la majorité de ses albums. Il en fut
fort surpris et moi j'ai découvert un homme charmant. Pourtant, Étienne
Delessert, je l'avais vu souvent, de loin, à la Foire du livre pour enfants de
Bologne, dès 1985. Il animait des rencontres à ce qui allait être le Café des
illustrateurs. Il accompagnait son épouse Rita Marshall qui y recevait nombre
de distinctions, pleinement justifiées. Il régnait sur le stand suisse. Mais
il me faisait peur. Trop doué pour que je l'ose l'aborder. Trop précédé d'une
réputation de colérique.
Une fois le contact établi en France, nous sommes toujours restés en lien.
Souvent par Skype, le soir pour moi, bien plus tôt pour lui. Ensuite sur
WhatsApp. De quoi nous rattraper. Il m'a raconté tant de choses. Sur lui, ses
projets, ses idéaux, ses combats, ses regrets, ses colères aussi. Un de ses
derniers souhaits était de créer un cours de lecture des images à destination
des adultes. Étienne Delessert était mon ami.
Pour voir une vidéo rétrospective sur lui, créée par son fils Adrien en avril
2021, c'est sur Vimeo (ici).
Pour lire ce que j'ai écrit sur Étienne Delessert, nouveaux livres et projets, dans ce blog,
c'est
ici.
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