Détail de la première histoire. (c) Futuropolis. |
Bien sûr, "Trois fois dès l'aube" est au départ un roman attachant et plutôt déconcertant d'Alessandro Baricco (traduit de l'italien par Lise Caillat, Gallimard, 2015, Folio, 2016), où deux personnes, un homme et une femme, se rencontrent trois fois sans que ce soit vraiment possible puisque leurs âges n'évoluent pas en parallèle. Trois histoires nocturnes et fortes qui se terminent à l'aube sur un nouveau départ, contées dans la liberté que s'offre l'écrivain italien.
Aujourd'hui, "Trois fois dès l'aube" est aussi une remarquable bande dessinée grand format dont le titre a été légèrement modifié, "trois" est devenu "3". Cela donne "3 fois dès l'aube" (Futuropolis, 104 pages), dont le récit adapté de la traduction française du roman d'Alessandro Baricco est signé Denis Lapière et les illustrations Aude Samama. Le temps y est évidemment celui du récit initial, un Temps anormal qui n'existe pas au quotidien.
Hôtel Ambassador. (c) Futuropolis. |
On y retrouve les trois récits des trois rencontres entre cet homme et cette femme, dans la chronologie taquine de l'auteur. Alessandro Baricco, écrivain, musicologue, auteur et interprète de textes pour le théâtre, toujours traduit par Lise Caillat, né à Turin en 1958. La même année que le Belge Denis Lapière qui adapte son roman "Trois fois dès l'aube" en bande dessinée. La même année que moi. Alessandro Baricco, lauréat du Prix Médicis étranger 1995 pour son premier roman, "Château de la colère" et qui s'impose avec "Soie" comme un des grands écrivains de la nouvelle génération. L'album est remarquablement illustré par Aude Samama qui a choisi de ne pas border ses peintures et ses dessins de cadre noir. Ce qui permet d'apprécier son travail sur la couleur et la matière, parfois dans le style d'Edward Hopper mais pas toujours. Découpant ses pages en autant de cases que nécessaire pour mettre au mieux le récit en images, c'est elle qui porte véritablement l'album, dont le texte est réduit au minimum.
On suit les trois aubes, à l'hôtel Ambassador ✩✩✩, à l'Hôtel du Centre ✩✩ et à l'Hôtel Univers ✩✩.
Dans la première, un homme assis dans le hall dans l'hôtel sympathise avec une femme qui vient d'y entrer. Après un malaise de celle-ci, il l’héberge dans sa chambre. Il lui raconte un peu sa vie. Etait-ce une découverte pour elle, se demande-t-on à la fin de l'histoire, le soleil arrivé.
Rencontre dans le hall. (c) Futuropolis. |
Dans la deuxième, un portier d'hôtel déjà un peu âgé tente de venir en aide à une jeune cliente dont le compagnon s'avère être un individu violent et dangereux. A l'aube, ils sortent dans les rues et il lui confie une part noire de son passé.
Course-poursuite. (c) Futuropolis. |
La troisième présente l'homme quand il était encore l'enfant qui a assisté à la mort de ses parents dans l'incendie de leur maison et qui se trouve en compagnie d'une inspectrice de police, à la veille de sa retraite, qui veut le conduire en lieu sûr après ce drame.
Echange de confidences. (c) Futuropolis. |
Chaque fois, ces douloureuses histoires de nuit se terminent à l'aube sur un nouveau départ. Elles sont toutefois bien plus que cela, tant elles croisent leurs personnages, leurs récits, qu'elles multiplient les coïncidences et les détails que l'illustratrice excelle à rendre. Ensemble, elles constituent un récit unique qui tord la logique du temps et présente deux humains dans leur force ou leur détresse.
Aude Samama a illustré d'autres albums chez Futropolis mais aussi "A l'abandon" de Laurence Tardieu (Naïve, 2009), "La cuisine du Cahier bleu" de Jacqueline Aubenas (Les Impressions Nouvelles, 2012) ainsi que des romans jeunesse.
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