Nombre total de pages vues

samedi 26 octobre 2013

L100 va bien accompagnée vers l'heure d'hiver


Même pas peur.
Plein d'albums pour enfants (à partager avec les grands) sont près de moi et font défiler les saisons.


"Voyage d'hiver" d'Anne Brouillard (Esperluète éditions) en premier lieu. Une épatante fresque en accordéon, au format d'un livre de poche, sans un mot de texte comme à l'habitude de l'auteure. On y suit la vue obtenue probablement au long d'une ligne de chemin de fer. Défilent de page en page des rails, des wagons à l'arrêt, des gens, plus loin des maisons, des arbres, un décor qui se fond dans la brume froide...  Le petit monde d'Anne Brouillard qui est au moins autant peintre qu'illustratrice.

En découvrant ses images selon les plis du livre-accordéon ou en admirant la fresque complète, on contemple tout l'univers pictural de l'artiste, née en 1967 d'un père belge et d'une mère suédoise. Un merle, une route fermée pour le passage du train, un lac sur lequel se reflètent cabane, arbres en tenue d'hiver,  haute maison blanche, trio d'autres demeures, groupes d'autres encore... Chacune des bâtisses a son style et sa couleur et se prête à mille récits. Toutes s’intègrent lumineusement dans ce superbe chant poético-graphique à l'hiver.

Le voyageur (la voyageuse) de papier ne quitte jamais le bord de l'eau qui accueille ici des foulques, là une péniche ou encore une île dédiée aux jeux d'enfants, avant de revenir à notre époque, buildings et embouteillages de voitures, et de parvenir à destination, dans une gare. Même là, la poésie est encore présente.

Si Anne Brouillard aime retravailler les mêmes thèmes, elle les renouvelle chaque fois. Ceux du "Voyage d'hiver", on les a aussi rencontrés dans de précédents albums, les petits bijoux de peinture, de nature, de paix et de fantaisie que sont "De l'autre côté du lac" (Le Sorbier comme son premier album, l'impeccable "Trois chats" créé en 1990), "Berceuse du merle", "La famille foulque", "La vieille dame et les souris", "Le voyageur et les oiseaux", "Le pêcheur et l'oie" (tous les cinq au Seuil Jeunesse).

Ses images sont plus fortes que les mots pour créer des atmosphères, susciter des histoires. A chacun de les accueillir dans ce récit ferroviaire, promenade magnifique qui rappelle aussi que seul le train passe par des paysages insoupçonnés. Une fresque voyageuse et hivernale à partager entre petits et grands.



Trois moments de la fresque d'Anne Brouillard. (c) Esperluète.


A noter que les éditions Esperluète sont encore ce dimanche 27 octobre au neuvième Marché du Livre qui se tient au Musée royal de Mariemont.
Et qu'Anne Brouillard y sera ce dimanche 27 octobre à 16h30 pour prendre part à une conversation avec Anne Herbauts et Geneviève Casterman à propos de leurs relations à l'écriture et au dessin.
Enfin, les originaux du "Voyage d'hiver" sont exposés jusqu'au 31 octobre à Paris à la Librairie des Editeurs associés.




L'album "Après l'été", de Lucie Félix (Les Grandes Personnes) ensuite. Avec une belle pomme rouge découpée en couverture, signe que l'automne approche. Un album pour les plus jeunes, graphiquement réussi, où l'histoire se construit au fil de découpes dans les pages (rond, rectangle, triangle), laissant apparaître des formes simples, dans des couleurs posées en aplats. C'est un peu compliqué à expliquer mais tout simple quand on a le livre en main.

"C'est juste après l'été que les premières sont arrivées...", commence le texte posé sur un fond rouge découpé de trois ronds blancs. Des boules de neige? Pas du tout. La double page suivante donne la réponse: "Toutes rouges et toutes rondes!" On voit trois pommes pendre à des branches feuillues. "Mais je suis trop petite pour les attraper!", poursuit la narratrice, haute sans doute comme...Pleine d'imagination en tout cas puisqu'il lui suffit de poser des rectangles dans une découpe rectangulaire pour obtenir une échelle!
On suit l'invisible petite fille dans sa dégustation de fin d'été, puis dans sa rencontre avec le ver et le rouge-gorge.

A l'automne, elle se met en tête de construire une maison pour ses amis oiseaux, avec le même procédé des formes et des découpes.
La voilà.

La narratrice a construit une maison pour ses amis. (c) Lucie Félix/Les Grandes Personnes.

Quand l'orage éclate, tout est dévasté et des pièces de toutes sortes et de toutes couleurs occupent la page. Il faut un panier pour ranger  les pommes, des clous pour fixer solidement la maisonnette à l'arbre... Formes et découpes sont encore convoqués pour que tous passent un bon hiver, gage d'un printemps plein d'oisillons et de fleurs de pommier.

"Après l'été" est un album rudement bien construit, qui célèbre d'une façon originale le cycle de la vie. Beaucoup plus riche qu'il ne peut paraître au premier abord. A partager évidemment entre générations.




L'album "Après" de Laurent Moreau (Hélium) encore. Un album dont les couleurs font souvent penser à l'automne en majesté même s'il commence par ces mots: "Après l'hiver, le printemps redonne des couleurs." On voit dans la double page remplie de dessins joyeusement botaniques un jeune jardinier blond arroser des plantes énormes sans qu'elles n'aient rien d'effrayant. De nombreux insectes et un oiseau le regardent faire de loin.

Chaque page du livre commence par le mot "après" et aborde les petites et les grandes choses de la vie d'un enfant: la graine qui devient fleur, les flaques après la pluie, le souvenir des rêves après la sonnerie du réveil... Les idées s'enchaînent, parfois clairement, parfois pas. Comme dans la vie.

Le texte est agréablement réduit au minimum, laissant toute le place aux somptueuses illustrations de Laurent Moreau qui excelle autant à représenter la réalité que l'imaginaire.

Les saisons se succèdent, les joies de l'été mais aussi une question aussi existentielle que celle-ci: "Après cette seconde, il n'y aura plus jamais cette seconde."
Quand arrive l'automne, ce sont les promenades dans les bois et les trésors à collecter.

Le tri des trésors collectés après une promenade en forêt. (c) Laurent Moreau/Hélium.

Avec le vent de l'automne et le froid de l'hiver arrivent d'autres grandes questions et d'autres sujets de réjouissances. Cet album plein de points d'interrogation (il comporte 40 pages) s'achève sur une note extrêmement rassurante, entre quelques boules de neige qui volent. Un livre pour confronter les points de vue des enfants et de leurs aînés sur des questions finement proposées.




Pour garder l'été, "Marée haute" de Bernardo Carvalho (Gallimard Jeunesse/Giboulées). Un grand format cartonné sans texte où l'auteur-illustrateur portugais raconte dans ses formidables images une plage à marée basse. On voit les uns et les autres courir ou se promener le long du rivage, se coucher, s'asseoir ou lire sur le sable, jouer et patauger dans les flaques, chercher des vers pour la pêche, découvrir coquillages et autres mollusques, escalader un rocher bien haut.

Mais petit à petit, la mer monte et les activités changent. Le niveau d'eau de la flaque arrive aux mollets, le pêcheur sort son épuisette, on peut plonger dans la mer, sauter dans l'eau depuis le rocher, se faire cueillir par la marée sous le parasol. Le bleu gagne de plus en plus les pages, et les estivants y font le poirier ou le crawl tandis que l'auteur-illustrateur nous donne aussi des nouvelles des poissons sous l'eau.

Une superbe façon de traiter l'été à la mer. Rien n'est écrit mais tout se comprend dans ces merveilleuses images le plus souvent sur double page, d'une sobriété exemplaire.

Le même rivage revient au fil de l'album, la marée montant. (c) Bernardo Carvalho/Gallimard Jeunesse/Giboulées.




Et parce que c'est ce qui nous attend, le nouvel album de Bénédicte Guettier, "L'âne Trotro, où sont les fleurs en hiver?" (Gallimard Jeunesse/Giboulées). Qu'il est mignon ce petit âne gris à crinière blanche dont voici déjà la 27e aventure!

Cette fois, l'amoureux des fleurs s'inquiète de leur sort pendant l'hiver. Il ne les voit plus, même en remuant la neige. L'eau pour les arroser est gelée. A qui poser ses questions? Son ami l'écureuil s'est endormi et les oiseaux sont partis. Reste Maman, qui le rassure: "Les fleurs se reposent dans la terre pour préparer le spectacle du printemps." Une réponse qui permet à Trotro de se consacrer alors à préparer son "spectacle de l'hiver" à lui, fabriquer un grand et beau bonhomme de neige!

Humour et tendresse dans cette jolie histoire à hauteur de tout petit enfant.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire